Hyperemesis gravidarum

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L’hyperémèse gravidique (HG), ou hyperemesis gravidarum, est une maladie hormonale[1],[2], qui provoque de très graves nausées chez la femme enceinte[2], avec des vomissements qui peuvent provoquer déshydratation, sous-nutrition, perte de poids, et d'autres affections qui peuvent nécessiter une hospitalisation[3].

Le phénomène concerne environ 0,3 % à 2% des grossesses aujourd’hui (soit presque 30 000 grossesses par an en France)[1],[4], tandis que la variante bégnine concerne environ 30 à 50 % des femmes enceintes, qui ont des nausées particulièrement le matin, le plus souvent au cours du premier trimestre de grossesse. Ces nausées sont certes inconfortables, mais n’ont rien de comparables à celles dont sont victimes les femmes atteintes d’hyperémèse gravidique[5]. Les femmes concernées auraient une susceptibilité à réagir à l’hormone de la grossesse, la bêta-hCG (hormone chorionique gonadotrophique).

On parle de « vomissements incoercibles », lorsqu’une femme enceinte a des vomissements ou des troubles alimentaires liés à la grossesse avec une perte de poids importante ou une intolérance alimentaire totale.

Ces vomissements incoercibles débutent entre 4 et 8 semaines d’aménorrhée (SA), et dans la plupart des cas, disparaissent à la fin du premier trimestre de grossesse (13-15 SA). Cependant, certaines femmes souffrent de vomissements incoercibles pendant toute la durée de leur grossesse, et ceux-ci disparaissent rapidement après la naissance de l’enfant. Ces symptômes peuvent entraîner chez les femmes gravement atteintes une déshydratation et des troubles ioniques (perte de sel, chlore, potassium…).

En outre, les femmes qui ne prennent pas suffisamment de poids pendant leur grossesse (moins de 7 kg) sont exposées à divers risques non négligeables : diabète gestationnel, déclenchement du travail et césarienne. Aussi, si la perte de poids est importante, le bébé peut avoir un petit poids à la naissance. Ce risque serait doublé, selon une étude française, et celui de retard de croissance intra-utérin (RCIU) serait lui aussi augmenté.

Les symptômes[modifier | modifier le code]

Les symptômes de l’hyperémèse gravidique sont multiples. Plus il y a de symptômes, plus la gravité de l’HG est forte.

Les principaux symptômes retenus par les professionnels sont les suivants :

  • Une perte de poids (au moins 5 % du poids total du poids de départ),
  • Une déshydratation,
  • Des vomissements incoercibles (de 5 à plus de 50 fois par jour),
  • Un état de cétose (causé par la malnutrition),
  • Une fatigue extrême généralisée,
  • Des troubles hydro-électrolytiques (qui peuvent causer des troubles neurologiques).

Il est important d’ajouter que dans la réalité des choses, les symptômes sont bien plus nombreux :

Les principales conséquences[modifier | modifier le code]

Comme tout vomissement chronique, l'HG engendre hypovolémie, hypokaliémie, hyponatrémie, alcalose non respiratoire, malnutrition[6].

Les causes[modifier | modifier le code]

Les causes de l’hyperémèse gravidiques sont restées longtemps méconnues.

On a pensé à un taux d’hormones bêta-hCG supérieur à la normale. Il existe même de rares cas familiaux (femmes touchées de mères en filles) pour lesquels il a été montré une anomalie des récepteurs à la bêta-hCG.

Des études ont par ailleurs montré des prédispositions génétiques (les afroaméricaines sont plus touchées que les Caucasiennes), un poids peu élevé avant la grossesse, le fait d’être nullipare ou d’avoir des antécédents d’hyperémèse gravidique lors d’une première grossesse.

Le sexe du bébé joue un rôle lorsqu’il y a une susceptibilité individuelle. Ainsi, il y a plus de cas d’hypermesis gravidarum lors des grossesses avec un fœtus féminin. En effet la production d’hormones est plus importante lorsque le fœtus est une fille mais l'hyperémèse gravidique touche également les femmes enceintes de garçons[réf. nécessaire].

Une chose reste sûre, cette maladie n’est pas psychologique. La médecine a longtemps considéré l'hyperémèse gravidique comme une affection psychologique ; faisant que de nombreuses femmes se sont retrouvées seules, incomprises et isolées face à cette maladie souvent comparée aux effets secondaires d'une chimiothérapie, en pire. Les traitements étaient, et sont encore, inadaptés (comme l'isolement en chambre d'hôpital avec perfusions et interdiction d'interagir avec le monde extérieur), amplifiant la détresse psychologique de la femme et aggravant son calvaire.

L’origine de l'hyperémèse gravidique a été considérée comme souvent multifactorielle, avec :

  • Rôle génétique : les femmes nées de mère ayant eu des vomissements sévères sont plus à risque de vomissements gravidiques
  • Rôle de l’hCG qui a une activité TSH-like, donc souvent proportionnelle au taux d’hCG pouvant entraîner une hyperthyroïdie passagère associée aux vomissements gravidiques (60%)
  • Rôle probable de l’augmentation du taux de progestérone, ACTH et leptine
  • Facteurs psycho-sociaux : stress, troubles du comportement alimentaire, isolement lié à la maladie...
  • Relâchement du SIO (sphincter inférieur de l’œsophage) dû à la progestérone…

Une étude publiée en 2023 a conclu qu'il s'agit d'une hypersensibilité à l’hormone GDF15 (connue pour de nombreuses fonctions de l’organisme, dont le contrôle de l’appétit, du poids et du métabolisme du fer, et qui augmente régulièrement durant la grossesse) : plus ce taux d'hormones GDF15 était bas avant d'être enceinte, et plus il y a de risques d'hypersensibilité de la femme à cette hormone et par suite un risque accru d'hyperémèse gravidique pendant la grossesse, quand le foetus produit la GDF15 à haute dose. Inversement, les femmes atteintes de β-thalassémie, qui ont donc des taux chroniquement élevés de GDF15, ont peu de nausées et vomissements pendant la grossesse[2],[7].

Les traitements[modifier | modifier le code]

Le traitement de l’hyperémèse gravidique repose sur différents facteurs, en effet, il faut associer un traitement médicamenteux avec des règles hygiéno-diététiques.

Il est conseillé de suivre les règles hygiéno-diététiques indiquées pour les simples nausées de grossesse :

  • Manger en petites quantités, de manière fractionnée.
  • Préférer des aliments liquides ou faciles à digérer, et qui n’ont pas un goût trop prononcé.
  • Manger quelque chose au lit avant de se lever une quinzaine de minutes après car être à jeun accentue les vomissements.
  • Si vraiment rien ne passe, boire des boissons sucrées (coca, limonade, eau gazeuse…) car le corps en retiendra toujours un peu et cela lui apportera un peu de glucose.
  • Se reposer le plus possible car la fatigue aggrave les nausées et les vomissements.

Selon une étude publiée en 2023, les femmes ayant des taux bas d'hormones GDF15 avant une grossesse présentent un risque accru d'hyperémèse gravidique. Des expériences menées sur des souris conduisent donc à deux solutions : la première est d'injecter de la GDF15 avant la grossesse, et la seconde est d'inhiber la GDF15 pendant la grossesse[2].

Nausées et vomissements[modifier | modifier le code]

Dès l'apparition des nausées et vomissements, il ne faut pas avoir peur d’avoir recours à des traitements médicamenteux :

En première intention, le médecin peut prescrire les traitements suivants : Donormyl + Primperan. La prise de vitamine B6 semble apaiser également les vomissements de manière significative, mais aucune étude fiable n'a à ce jour pu attester de l'efficacité de la B6 pour traiter les nausées et vomissements pendant la grossesse. Le Vogalene(cachet ou suppositoire) peut aider à stopper les vomissements.

En deuxième intention, en cas d’échec du traitement mis en place, le médecin peut prescrire, sur ordonnance d’exception, du Zophren. Ce médicament a prouvé sa forte efficacité dans le traitement de l’HG. Néanmoins, des études ont mis en évidence un lien possible avec des malformations. Il est donc recommandé de ne pas y avoir recours avant 10 SA[8]. Il peut être associé avec le Donormyl pour plus de résultats.

Certains médecins se tournent également vers le Largactil, mais les effets secondaires de ce dernier sont assez contraignants.

Quand la perte de poids est supérieure à 10 % du poids initial, la future maman doit être hospitalisée. Une réhydratation intraveineuse est alors mise en place et l’alimentation orale reprise lorsque les vomissements ont cessé et que la chute de poids est enrayée.

Reflux acide[modifier | modifier le code]

Le traitement recommandé en cas de reflux acide est l’Oméprazole, il permet de diminuer considérablement les remontées acides dans l’œsophage en agissant sur la pompe à protons.

Déshydratation[modifier | modifier le code]

La déshydratation est un problème majeur chez les femmes souffrant d’HG car cela peut entrainer des complications graves. En cas de déshydratation, la solution la plus efficace reste la perfusion.

Aussi, les femmes enceintes peuvent trouver des astuces pour rester un maximum hydratées malgré les vomissements : glaçons, glaces à l’eau en bâton, solution SRO (soluté de réhydratation)

Douleurs abdominales[modifier | modifier le code]

En cas de douleurs abdominales, souvent liées à la constipation ou aux vomissements répétés, du Spasfon peut être prescrit. Si les douleurs semblent persistantes ou d’intensité trop élevée, il est important d’en informer rapidement le médecin traitant, gynécologue ou dans les cas les plus graves de se rendre aux Urgences les plus proches.

Constipation[modifier | modifier le code]

L’alimentation durant l’HG étant difficile, des constipations peuvent survenir. Celles-ci peuvent être également un effet secondaire de certains médicaments.

Il est alors recommandé de prendre par exemple de l’Eductyl[9] (la version enfant en suppositoire peut être préférée car elle présente moins d’effets indésirables).

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a et b (en) 23andMe Research Team, Marlena S. Fejzo, Olga V. Sazonova et J. Fah Sathirapongsasuti, « Placenta and appetite genes GDF15 and IGFBP7 are associated with hyperemesis gravidarum », Nature Communications, vol. 9, no 1,‎ , p. 1178 (ISSN 2041-1723, PMID 29563502, PMCID PMC5862842, DOI 10.1038/s41467-018-03258-0, lire en ligne, consulté le )
  2. a b c et d Olivier Monod, « Nausées des femmes enceintes : le mécanisme en cause mieux identifié et peut-être bientôt traité », sur Libération, (consulté le )
  3. Juliette Brossault, « Qu’est-ce que l’hyperémèse gravidique, cette maladie qui fait de la grossesse un enfer ? », sur Ouest-France.fr, (consulté le )
  4. David Gruselle, Aurélie (1982-). Auteur., Nausées et vomissements du premier trimestre de la grossesse : les « petits maux de la grossesse » vus par les patientes et leurs médecins, s.n., (OCLC 1247856566, lire en ligne), p. 6
  5. « Qu'est-ce que c'est l'hyperémèse gravidique », sur associationhg.fr (consulté le )
  6. Florian Lang, Dominique Duval, Rüdiger Gay et Astried Rothenburger, Atlas de poche de physiopathologie, (ISBN 978-2-257-20595-7, OCLC 911943593, lire en ligne), p. 152
  7. « Le mystère des nausées pendant la grossesse enfin levé », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  8. « Antiémétiques - Grossesse et allaitement », sur lecrat.fr (consulté le )
  9. « EDUCTYL », sur vidal.fr (consulté le ).

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Virginie Im et Dr. Michel Briex, « Hyperémèse gravidique », Spirale, vol. 1, no 105,‎ , p. 168-171 (lire en ligne)
  • Christine Chalut-Natal Morin, « Nausées et vomissements gravidiques », dans Hypnose en gynécologie et obstétrique en 35 notions, Dunod, (lire en ligne), p. 88-92.
  • Antonette T. Dulay, « Hyperemesis gravidarum », sur merckmanuals.com, octobre 2022.